le 7 février 2018
41.4.99
Contexte
Le fonctionnaire s’estimant lésé travaille à Ministère X. Il a été touché par la fermeture du Lieu A, en septembre 2013. Le 9 novembre 2012, en guise de préparation à la fermeture de l’établissement, le fonctionnaire s’estimant lésé a accepté une mutation à Lieu B dont la date de début n’était pas encore déterminée. Le 28 juin 2013, il a été confirmé que le fonctionnaire s’estimant lésé commencerait à travailler à Lieu B à compter du 30 septembre 2013. Compte tenu de sa mutation future, le fonctionnaire s’estimant lésé a déménagé en juin 2013 pour établir sa résidence principale à proximité de son nouveau lieu de travail. Au moment de la réinstallation, l’employeur était d’avis que le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait droit à aucune indemnité de réinstallation, puisqu’il jugeait que la région de Ville A représentait le lieu de travail du fonctionnaire. À la suite des décisions 41.4.56 et 41.4.62 du Comité exécutif du CNM en date du 18 décembre 2013, concluant que la région de Ville A ne pouvait pas être utilisée comme lieu de travail en ce qui concerne la Directive sur la réinstallation, une lettre d’offre modifiée en date du 10 juin 2014 a été émise à tous les fonctionnaires s’estimant lésés en question, y compris à ce fonctionnaire s’estimant lésé.
Selon le libellé de la lettre d’offre modifiée indiquant que le fonctionnaire s’estimant lésé pourrait être admissible à une aide à la réinstallation, ce dernier a communiqué avec le fournisseur de services de réinstallation (FSR) en juin 2014. Le FSR a commencé à rembourser rétroactivement au fonctionnaire s’estimant lésé les coûts de réinstallation engagés en 2013, à la suite de la décision du Comité exécutif du CNM. Étant donné que l’employé demandait le remboursement de dépenses engagées plus de trente (30) jours avant la date de l’inscription auprès du FSR, conformément au paragraphe 2.1.1 de la Directive, le FSR a reçu la directive de laisser le dossier en suspens jusqu’à ce que le responsable de programme du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT) ait pris une décision sur le dossier de réinstallation pour une autorisation a posteriori. Le 7 juillet 2015, le responsable de programme du SCT a rejeté le dossier de réinstallation du fonctionnaire s’estimant lésé, en indiquant que (traduction) « l’autorité de programme n’a trouvé aucune circonstance exceptionnelle qui justifiait la réinstallation de l’employé avant qu’il ne soit autorisé à le faire ». Étant donné cette décision, le ministère a informé le fonctionnaire s’estimant lésé qu’il devrait récupérer tous les remboursements qu’il lui avait versés en vertu de la Directive sur la réinstallation. Le fonctionnaire s’estimant lésé conteste donc la décision de l’employeur de refuser rétroactivement les indemnités de réinstallation et le recouvrement de ces indemnités. À ce jour, le ministère a reporté le recouvrement en attendant une décision relativement au présent grief.
Grief
Le fonctionnaire s’estimant lésé conteste la décision de l’employeur de refuser rétroactivement de lui verser ses indemnités de réinstallation et de récupérer les sommes déjà payées en vertu de la Directive.
Présentation de l’Agent négociateur
Le représentant de l’agent négociateur a indiqué que, peu de temps après l’annonce de la fermeture du Lieu A, une assemblée du personnel a été convoquée. Pendant cette assemblée, les employés ont été informés que ceux qui étaient mutés du Lieu A à un lieu de travail situé à plus de 40 km de leur lieu de résidence actuel seraient admissibles à une aide à la réinstallation à la demande de l’employeur. Peu de temps après, le ministère a créé une liste d’admissibilité à la réinstallation sur laquelle figuraient tous les employés, ainsi que la mention « oui, réinstallation » ou « pas de réinstallation » à côté du nom de chacun. Il était indiqué, à côté du nom du fonctionnaire s’estimant lésé « oui, réinstallation » et cette information lui a été transmise. Après cet exercice, le 13 novembre 2012, le ministère a revu sa position et a souligné qu’il considérait maintenant la région du Ville A comme un lieu de travail unique. Le ministère a refusé l’aide à la réinstallation à tous les agents qui ont été transférés du Lieu A à Lieu B, à Lieu C, à Lieu D ou à Lieu E. Le fonctionnaire s’estimant lésé a été transféré du Lieu A à Lieu B. Le fonctionnaire s’estimant lésé conteste cette décision et il a été informé que le CNM avait accueilli son grief le 22 janvier 2014 (41.4.56 et 62). Entre le moment où il a déposé son grief et celui où le CNM a rendu sa décision, le fonctionnaire s’estimant lésé a vendu sa maison et s’est réinstallé plus près de son nouveau lieu de travail. Dès qu’il a reçu la décision du CNM, le ministère a informé le fonctionnaire s’estimant lésé que [traduction] « le Ministère X a accepté de vous offrir une aide à la réinstallation ». Le fonctionnaire s’estimant lésé a demandé s’il [traduction] « pouvait obtenir une aide à la réinstallation, même s’[il avait] déjà déménagé? » ce à quoi le ministère a répondu que [traduction] « dans le pire des cas [il] devrait présenter un dossier de réinstallation afin d’expliquer pourquoi il demande à obtenir des indemnités après le déménagement ». Le ministère a renvoyé le dossier de réinstallation du fonctionnaire s’estimant lésé à Services globaux de relogement Brookfield, un dossier a été ouvert et le fonctionnaire s’estimant lésé s’est vu accorder le remboursement de la quasi?totalité de ses frais de réinstallation, qui s’élèvent à environ 25 000 $. Après avoir reçu son remboursement, le fonctionnaire s’estimant lésé a été informé que son dossier avait été mis en suspens en l’attente de l’approbation du Conseil du Trésor pour l’autorisation a posteriori. Afin d’obtenir l’approbation, le ministère a préparé un seul dossier de réinstallation pour appuyer les fonctionnaires s’estimant lésés touchés par la décision relative à la région de Ville A et a complété chaque cas en ajoutant des renseignements propres à chaque fonctionnaire. Le ministère a présenté le dossier de réinstallation du fonctionnaire s’estimant lésé, auquel il a joint une recommandation d’approuver le remboursement de la totalité des frais de réinstallation. Toutefois, le 7 juillet 2015, trois ans après avoir choisi un nouveau lieu de travail et deux ans après avoir indiqué au fonctionnaire s’estimant lésé la date de sa réinstallation, le responsable de programme du SCT a rejeté sa demande puisqu’il n’y avait aucune circonstance exceptionnelle justifiant la réinstallation de l’employé avant qu’il ne reçoive une autorisation écrite de le faire.
Le représentant de l’agent négociateur est d’avis que l’autorisation de l’employeur a été communiquée à deux reprises par écrit : la première fois lorsqu’on lui a présenté la liste d’admissibilité à la réinstallation, et la deuxième fois, après la décision du CNM, lorsque le ministère lui a envoyé un courriel afin de l’informer que le (traduction) « Ministère X a accepté de vous offrir une aide à la réinstallation ». Le changement de position de l’employeur ne respecte pas les principes qui suivent de la Directive :
Confiance – le fonctionnaire s’estimant lésé a été avisé à de nombreuses reprises qu’il recevrait une aide à la réinstallation, pour ensuite se la voir refuser après qu’il ait pris des décisions et fait des arrangements relativement à son nouveau lieu de travail.
Souplesse – Le refus ne répond pas aux besoins et à l’intérêt du fonctionnaire s’estimant lésé, notamment l’importance d’installer sa famille et ses enfants dans leur nouvelle résidence avant le début de l’année scolaire et l’exigence de se présenter à son nouveau lieu de travail en septembre.
Respect – Les volte?face à répétition de l’employeur sur l’offre d’une aide à la réinstallation manquaient de sensibilité à l’égard du fonctionnaire et ne représentent pas un environnement réceptif aux besoins du fonctionnaire s’estimant lésé.
Valorisation des personnes – L’employeur n’a pas traité le fonctionnaire s’estimant lésé avec professionnalisme et ne l’a pas soutenu, lui et sa famille, dans le contexte de la réinstallation.
Qui plus est, ce n’est pas l’employé qui n’a pas réussi à obtenir une autorisation au préalable; c’est plutôt l’employeur qui n’a pas fourni l’autorisation préalable de manière appropriée. L’employé aurait obtenu une autorisation appropriée dès le début, n’eût été l’interprétation et l’utilisation erronées de la région de Ville A. Selon l’un des principes généraux en relations de travail en ce qui concerne les décisions relatives aux griefs, le tiers partie devrait chercher à remettre le fonctionnaire s’estimant lésé dans la position où il se serait trouvé, n’eût été l’interprétation erronée de l’employeur. Par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé aurait dû recevoir une aide à la réinstallation à la suite de la décision du CNM.
Il incombe à l’employeur d’autoriser la réinstallation et de s’assurer que les dispositions y étant liées sont conformes à la Directive, conformément aux paragraphes 2.1.1 et 2.2.1.5. Dès que le représentant de l’employeur autorise la réinstallation par écrit, ce qu’il a fait, il y devient lié. Le responsable de programme du SCT a agi de façon injuste lorsqu’il a refusé par la suite d’accorder l’indemnité au motif que le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas demandé une autorisation préalable, alors que c’est l’employeur qui a refusé de donner l’autorisation appropriée au moment de la réinstallation.
Présentation du Ministère
Le représentant du ministère est d’avis que le fonctionnaire s’estimant lésé s’est réinstallé avant d’obtenir l’autorisation écrite de le faire. Dans la première lettre d’offre du fonctionnaire s’estimant lésé, la date de début de la mutation était indéterminée et la réinstallation n’était pas mentionnée. Le fonctionnaire s’estimant lésé l’a signée et acceptée en janvier 2013. En juin 2013, le fonctionnaire s’estimant lésé s’est réinstallé. Plus tard durant le même mois, le fonctionnaire s’estimant lésé a reçu une lettre l’informant que sa mutation entrerait en vigueur le 30 septembre 2013. Encore une fois, il n’est pas question de réinstallation dans cette lettre que le fonctionnaire s’estimant lésé a signée et acceptée le 2 juillet 2013. Par la suite, en juin 2014, le fonctionnaire s’estimant lésé a reçu un « addenda » à la lettre d’offre originale, l’informant qu’il pourrait être admissible à une aide à la réinstallation. Le fonctionnaire s’estimant lésé a ensuite communiqué avec les Finances régionales, un dossier a été ouvert avec le fournisseur de services de réinstallation et, en juillet 2014, le FSR a remboursé au fonctionnaire s’estimant lésé une somme d’environ 23 402 $. Ce remboursement a cependant été effectué par erreur. En janvier 2015, un dossier de réinstallation, dans lequel le ministère recommande l’autorisation a posteriori des frais de réinstallation, a été présenté au responsable de programme. Le 7 juillet 2015, le responsable de programme du SCT refuse la demande d’autorisation a posteriori en indiquant qu’il [traduction] « n’a trouvé aucune circonstance exceptionnelle justifiant la réinstallation de l’employé avant qu’il ne soit autorisé à le faire ».
Le représentant du ministère est d’avis que le paragraphe 2.1.1 prévoit explicitement que l’autorisation « est fournie à l’avance par écrit ». Le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas l’autorisation écrite de se réinstaller lorsqu’il a engagé les dépenses liées à la vente de sa maison et à son déménagement. En réalité, l’employeur n’a donné son autorisation écrite qu’en juin 2014, environ un an après le déménagement du fonctionnaire s’estimant lésé.
Les employés doivent, en vertu du paragraphe 2.2.2.2, « [obtenir] une autorisation écrite avant d’engager quelque dépense de réinstallation que ce soit » et, en vertu du paragraphe 2.2.2.1, lire la Directive et « consulte[r] le FSR avant d’entreprendre toute activité de réinstallation ». Le fonctionnaire s’estimant lésé ne s’est acquitté d’aucune de ces obligations. Les employés sont tenus de lire la Directive et d’obtenir des précisions s’il y a lieu. En entreprenant des activités de réinstallation sans autorisation écrite, le fonctionnaire s’estimant lésé a agi en sachant parfaitement qu’il ne serait pas admissible à recevoir des indemnités de réinstallation et, par conséquent, il doit en accepter les conséquences financières.
En ce qui concerne la question de l’autorisation a posteriori en vertu du paragraphe 2.1.1, le responsable de programme du SCT a le pouvoir délégué dans cette affaire et a refusé la demande du fonctionnaire s’estimant lésé parce qu’aucune circonstance exceptionnelle justifiait la réinstallation de l’employé avant qu’il ne soit autorisé à le faire n’a été présentée. Le fonctionnaire s’estimant lésé a obtenu par erreur un remboursement de 23 402 $ et la Directive prévoit qu’un employé à qui on a versé toute somme par erreur, doit rembourser ce montant au complet dès que le FSR l’en informe. La jurisprudence du CNM (41.4.22 et 41.4.105) confirme que le remboursement des dépenses justifiables et raisonnables doit être envisagé seulement une fois que la réinstallation est autorisée, et précise que cette autorisation doit être obtenue au préalable.
Décision du Comité exécutif
Le Comité exécutif examine le rapport du Comité sur la réinstallation et mentionne que ce dernier n’a pu parvenir à une entente quant à l’intention de la Directive. Le Comité exécutif, quant à lui, conclut que l’employé n’a pas été traité conformément à l’intention de la Directive. Par conséquent, le grief est accueilli.