le 11 juin 2018

21.4.1109

Contexte

Le fonctionnaire s’estimant lésé travaille à Ministère X à Ville A depuis mai 2000. Depuis 2010, certaines des tâches du fonctionnaire s’estimant lésé nécessitent qu’il traverse la frontière quotidiennement pour se rendre à une installation appartenant au Ministère X qui se trouve à Ville B (à trois kilomètres du poste). Pendant toutes les périodes pertinentes, il est convenu que la résidence principale du fonctionnaire s’estimant lésé se trouve au Canada. En juin 2014, ou avant, des changements apportés à la législation canado?américaine ont entraîné des modifications au chapitre des exigences fiscales (FACTA, 27 juin 2014). En juillet 2014, et par la suite en février 2015, des questions ont été soulevées auprès de la direction au sujet du fonctionnaire s’estimant lésé en ce qui concerne sa situation fiscale en raison de son passage à la frontière pour se rendre à l’installation de Ministère X aux États?Unis (É.-U.). Peu de temps après, le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté trois demandes d’indemnité de déplacement le 7 juillet (9 022,33 $), le 1er octobre (2 708,14 $) et le 9 novembre 2015 (446,14 $), pour un total de 12 176,61 $. Ces factures représentaient la production de la déclaration de revenus aux É.?U. qui remonte à l’année d’imposition se terminant le 31 décembre 2008. L’employeur a refusé ces demandes d’indemnité en précisant qu’elles n’étaient pas attribuables à son travail aux É.?U. et qu’elles auraient été engagées indépendamment de son lieu de travail, puisqu’il avait double citoyenneté (au Canada et aux É.?U.).

Grief

L’employé se plaint de l’échec continu de l’employeur à honorer les trois demandes d’indemnité de déplacement (9 022,33 $, 933,82 $ et 3 708,14 $) en précisant que tous ces frais ont été engagés au cours de ses déplacements répétés aux É.?U. qui sont exigés dans le cadre de son emploi. L’employé est d’avis qu’il s’agit d’une violation de l’article G5 de la convention collective applicable, conformément, en partie, aux Directives sur le service extérieur et à la Directive sur les voyages du CNM, entre autres.

Présentation de l’Agent négociateur

Le représentant de la partie syndicale a soutenu que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas été traité conformément à l’esprit de la Directive, car selon lui, le fonctionnaire s’estimant lésé avait droit au remboursement des frais qu’il avait engagés pour la production à l’Internal Revenue Service (IRS). Ces frais sont directement liés à l’exigence nécessitant que le fonctionnaire s’estimant lésé se rende aux É.?U. pour son travail. Le fait qu’il soit obligé de se rendre aux É.?U. pour son travail et qu’il soit en déplacement autorisé en service commandé lorsqu’il exerce ses fonctions aux É.?U. n’est pas contesté. Par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé est admissible à un remboursement des dépenses raisonnables engagées pendant un voyage en service commandé, étant donné que selon la Directive les employés ne devraient pas avoir à engager des frais supplémentaires. Selon l’agent négociateur, les dépenses visées par le présent grief ne sont pas les mêmes que celles pour lesquelles les employés présentent souvent une demande d’indemnité de déplacement, mais elles ne sont pas plus inhabituelles que la situation de travail qui les a engendrées.

Conformément au paragraphe 3.1.2 de la Directive, certaines dépenses supplémentaires des employés peuvent être remboursées et, selon l’agent négociateur, les dépenses visées par le grief peuvent raisonnablement être remboursées en vertu de cette disposition.

Le fonctionnaire a également droit au remboursement de frais/droits de service, de dépenses réelles et raisonnables, de transactions financières tels que :

  • l’utilisation des guichets automatiques;
  • l’utilisation de la carte de voyage du gouvernement;
  • l’utilisation d’une carte de crédit/de débit;
  • la ou les commissions d’un établissement financier sur une opération en monnaie étrangère;
  • l’acquisition de chèques de voyage;
  • les frais d’encaissement de chèques.

Le représentant de la partie syndicale a expliqué que bien que l’on puisse prétendre que les dépenses en question ne sont pas raisonnables, il est encore moins raisonnable d’estimer que l’employé en soit responsable et qu’il doive les assumer directement à la suite de déplacements exigés par l’employeur. Il est évident que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas engagé ces dépenses pour des raisons frivoles, mais parce que sa situation de travail nécessitait qu’il le fasse. Le conseiller du fonctionnaire s’estimant lésé a déterminé qu’un employé qui travaille aux É.?U. pour son employeur et qui n’est pas résident américain doit satisfaire aux exigences de production de déclarations de revenus de l’État. Cela n’a rien à voir avec la citoyenneté et tout à voir avec le fait d’être un non?résident qui gagne un revenu provenant de cet endroit aux É.?U. Par conséquent, tous les employés qui agissent au même titre et au même lieu de travail que le fonctionnaire s’estimant lésé et qui travaillent souvent aux É.?U. pour leur employeur doivent produire une déclaration de revenus annuelle aux É.?U.

Les personnes qui choisissent de respecter la loi américaine font immédiatement face à la conséquence sous la forme de coûts liés à la production d’une déclaration de revenus et du versement de tout impôt à payer. Ceux qui choisissent de faire fi de la loi américaine peuvent ne faire l’objet d’aucune conséquence financière immédiate, mais doivent être conscients du fait qu’ils peuvent être retracés et trouvés coupables d’évasion fiscale et se voir imposer une pénalité financière importante.

L’agent négociateur est d’avis que la véritable question traite du remboursement des dépenses engagées par le fonctionnaire s’estimant lésé directement dans le cadre des fonctions de son poste. En conséquence, l’agent négociateur demande que le grief soit accueilli et que les mesures correctives demandées soient accordées.

Présentation du Ministère

L’employeur affirme que l’obligation du fonctionnaire s’estimant lésé de produire des déclarations de revenus aux États?Unis découle de sa double citoyenneté et que, par conséquent, elle n’est pas uniquement attribuable à ses déplacements aux É.?U. exigés par l’employeur. Lorsque le fonctionnaire s’estimant lésé a été embauché par le ministère en 1989, il a rempli un « Avis de nomination et questionnaire du personnel ». Sur ce formulaire, dans la section portant sur la citoyenneté, il a inscrit « double citoyenneté canadienne et américaine ». Selon l’Internal Revenue Service (IRS), en général, les règles qui concernent la production de déclarations de revenus, de successions et de dons et le paiement de l’impôt évalué pour un citoyen des É.?U. ou un résident étranger sont les mêmes, que vous soyez aux É.?U. ou ailleurs.

Conformément à la convention fiscale entre les É.?U. et le Canada, les rémunérations, autres que les pensions, payées par le Canada à un citoyen du Canada, au titre de services rendus, dans l’exercice de fonctions de caractère public, ne sont imposables qu’au Canada. Il est suggéré qu’en présentant en pièce jointe le formulaire 8833 ou 1040X, le salaire ou les traitements du gouvernement du Canada provenant tant des É.?U. que du Canada peuvent être exclus. Il est souligné que la première facture présentée par le fonctionnaire s’estimant lésé concernait les années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013. Les formulaires ont été remplis pour au moins deux années d’imposition avant que le fonctionnaire s’estimant lésé soit obligé de satisfaire à l’exigence de traverser la frontière presque chaque jour. De plus, les factures n’incluent pas la préparation du formulaire 8833 ou 1040X, alors que l’un de ces formulaires serait requis pour présenter une demande d’exemption en vertu de la convention pour les salaires versés à un citoyen canadien par le gouvernement canadien.

En janvier 2016, l’employeur a reçu une opinion d’Ernst & Young LLP au sujet des incidences fiscales des employés qui fournissent des services transfrontaliers. Cette opinion précisait que les citoyens des États?Unis qui travaillent pour un gouvernement étranger ne sont pas exonérés de l’impôt des États?Unis. Par conséquent, il semble que l’absence de frais liés à la préparation de ces formulaires en particulier soit attribuable au fait que la citoyenneté du fonctionnaire s’estimant lésé l’empêchait de tirer avantage de l’allègement prévu dans la convention fiscale.

L’employeur a conclu que le fonctionnaire ait voyagé ou non pour l’employeur, il devait tout de même produire des déclarations de revenus aux É.?U. en raison de sa citoyenneté américaine. Quoi qu’il en soit, l’employeur soutient que les frais de préparation des déclarations de revenus ne sont pas des dépenses supplémentaires qui seraient remboursées en vertu du paragraphe 3.1.2 de la Directive sur les voyages. Selon l’employeur, il ne s’agit pas de « dépenses raisonnables qui ont dû être engagées pendant un voyage en service commandé ». L’intention de la Directive n’est pas de couvrir les dépenses personnelles liées à des frais imposés pour la préparation d’une déclaration de revenus personnelle.

L’employeur est d’avis qu’il semble que le fait de payer pour des dépenses qui, autrement, pourraient faire l’objet d’une indemnité aille au?delà de l’esprit de la Directive sur les voyages.

Décision du Comité exécutif

Le Comité exécutif examine le rapport du Comité des voyages en service commandé et accepte la conclusion selon laquelle l’employé avait été traité conformément à l’esprit de la Directive sur les voyages. Par conséquent, le grief est rejeté.