le 30 septembre 2020
21.4.1124
Contexte
Le fonctionnaire s’estimant lésé travaille à Ministère X et a été nommé dans la Région A (administration centrale) qui a fait partie de l’Unité F. En 2010, en raison d’une restriction médicale permanente l’empêchant d’obtenir et/ou d’entretenir l’arme à feu de service, des mesures d’adaptation ont été prises et le fonctionnaire s’estimant lésé a été affecté à l’Unité G, un milieu de travail sans arme situé à Ville B en Province M, à 15 kilomètres (km) de l’administration centrale. Le 26 novembre 2015, l’employeur a annoncé que l’Unité G allait devenir un lieu de travail armé. Par conséquent, les employés de l’Unité G visés par des mesures d’adaptation se sont vu offrir un poste au même niveau dans la Région A, y compris à l’Unité H.
À la suite d’une réunion avec l’employeur au sujet des changements apportés à l’organisation et au lieu de travail, le 2 décembre 2015, le fonctionnaire s’estimant lésé a précisé qu’il préférait travailler au secteur commercial de la Région A. Cependant, un courriel général envoyé aux membres du personnel du 5 janvier 2016 annonçait des changements dans le milieu de travail et indiquait que le fonctionnaire s’estimant lésé serait affecté à l’Unité H. Par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé a commencé à travailler à l’Unité H le 3 février 2016. Ce n’est que le 11 avril 2016 qu’une lettre d’offre a été envoyée disant que le lieu d’affectation initiale du fonctionnaire, soit l’Unité G, avait changé pour l’Unité H à partir du 1er février 2016.
En juillet 2016, le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté des demandes d’indemnité de déplacement pour le kilométrage et les repas, ainsi que des feuilles de temps modifiées pour la période du 3 février 2016 au 1er avril 2016. L’employeur a rejeté ces demandes. Le fonctionnaire s’estimant lésé continue de présenter des demandes d’indemnité de déplacement pour se présenter à l’Unité H. Il est important de souligner qu’à ce jour, le fonctionnaire s’estimant lésé n’a toujours pas signé sa lettre d’offre.
Grief
L’employé estime que l’employeur a contrevenu à la Directive sur les voyages du Conseil national mixte (CNM).
Présentation de l’agent négociateur
Le représentant de l’agent négociateur est d’avis que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas été traité conformément à la Directive. Au lieu de muter le fonctionnaire s’estimant lésé à son nouveau poste à l’extérieur de la zone de l’administration centrale, l’employeur l’a affecté à l’Unité H en modifiant le centre de coûts.
Le représentant a souligné que puisque l’administration centrale du fonctionnaire s’estimant lésé demeurait à l’Unité F, il devait, à la suite de l’affectation, se présenter à l’Unité H qui se trouvait à l’extérieur de la zone de son administration centrale. Par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé était admissible en vertu des dispositions de la Directive sur les voyages, article 3.2 – Voyages hors de la zone d’affectation – sans nuitée. Cela comprenait la disposition sur les indemnités de kilométrage et de repas. Lorsque le fonctionnaire s’estimant lésé a demandé d’être dédommagé de ces frais, il a essuyé un refus et a déposé un grief.
Auparavant, le fonctionnaire s’estimant lésé faisait 60 km chaque matin de son domicile au bureau de Ville B et il lui fallait environ une heure. L’exigence d’ajouter 35 km matin et soir prolongeait ses déplacements quotidiens de plus de 30 minutes. Le représentant a soutenu que telles distances supplémentaires sont pleinement prises en considération dans l’objet et la portée de la Directive sur les voyages qui prévoient le remboursement de dépenses raisonnables qui ont dû être engagées pendant un voyage en service commandé et font en sorte que les fonctionnaires n’ont pas à engager des frais supplémentaires. Le représentant a précisé que l’employeur ne peut affecter un employé à un autre lieu de travail sans que celui-ci soit indemnisé pour les frais supplémentaires qui découlent de cette affectation.
Le représentant a mentionné que deux mois avant d’affecter le fonctionnaire s’estimant lésé à l’Unité H, l’employeur avait été informé qu’un déploiement était requis pour déplacer le fonctionnaire s’estimant lésé à un nouveau lieu de travail, mais il a plutôt choisi d’affecter le fonctionnaire à l’Unité H. Par conséquent, puisque le fonctionnaire s’estimant lésé était en affectation et que l’employeur lui avait dit de se présenter à l’Unité H, l’employeur a autorisé le déplacement nécessaire pour se rendre au lieu de travail assigné. À peu près au même moment, vers la fin de 2015, l’employeur avait demandé si les circonstances du fonctionnaire s’estimant lésé l’auraient rendu admissible aux dispositions de la Directive de réinstallation, car étant donné que le fonctionnaire s’estimant lésé n’était pas déployé, il n’était pas en mesure de se prévaloir des dispositions de la Directive sur la réinstallation. Si tel avait été le cas, il aurait pu examiner la possibilité d’une réinstallation afin de réduire la distance à parcourir pour se rendre au travail et en revenir.
Le représentant a répété que l’employeur ne pouvait contourner des dispositions de la Directive sur les voyages en changeant tout simplement le centre de coûts de l’employé. L’employeur a changé le centre de coûts même s’il savait qu’il ne s’agissait pas d’une mesure appropriée, étant donné la lettre d’offre du fonctionnaire s’estimant lésé, et parce qu’il le sortait de la zone de son administration centrale. Le représentant a également souligné deux cas de jurisprudence qui appuient ce grief (21.4.981 et 988).
Étant donné que la Directive sur les voyages est la seule directive qui peut traiter convenablement des frais de déplacement assumés par un employé affecté à un lieu de travail situé à l’extérieur de la zone de son administration, le fonctionnaire s’estimant lésé n’a accès à aucun autre mécanisme d’indemnisation pour ses dépenses supplémentaires. Par conséquent, le représentant a demandé que le Comité des voyages en service commandé du CNM accueille le grief en fonction du bien-fondé de ce grief.
Présentation du ministère
Le représentant de l’employeur a soutenu que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été traité dans l’esprit de la Directive en soulignant que le changement de lieu de travail permanent était le nœud du grief. Par conséquent, le CNM n’a pas compétence en la matière, car la Directive sur les voyages n’aborde que les changements temporaires de lieu de travail à l’intérieur de la zone de l’administration centrale.
Le représentant a souligné qu’aucun voyage en service commandé n’a été autorisé pour le fonctionnaire s’estimant lésé. Conformément aux principes clés de la Directive sur les voyages, aux paragraphes 1.1.1, 1.1.2 et 1.5.2, les employés sont tenus de consulter et d’obtenir une autorisation de voyage en service commandé. Bien que le fonctionnaire s’estimant lésé ait consulté, on l’a informé le 10 juin 2016 qu’il n’était pas en service commandé.
En ce qui concerne les changements apportés à ses lieux de travail, le représentant a souligné la pertinence des définitions suivantes tirées de la Directive sur les voyages :
Zone d’affectation : aux fins de la présente directive, région qui s’étend sur 16 kilomètres du lieu de travail assigné en empruntant la route terrestre la plus directe, sûre et praticable.
Permanent/régulier : endroit permanent unique déterminé par l’employeur où un fonctionnaire exerce habituellement les fonctions de son poste ou d’où il relève.
Temporaire : l’unique lieu dans la zone d’affectation où un fonctionnaire doit temporairement se présenter ou exécuter les tâches liées à son poste.
Avec ces définitions dans l’esprit, le représentant a soutenu que ce grief traite d’un changement de lieu de travail permanent ou « régulier » apporté à la suite d’un processus de mesure d’adaptation et de la nécessité de tenir compte de limites et de restrictions médicales permanentes. Ces changements ne peuvent pas être décrit comme temporaires. Le fonctionnaire s’estimant lésé s’est présenté à l’Unité G et a accompli son travail durant cinq ans pour ensuite être affecté à l’Unité H pour une période de plus de quatre ans et c’est à cet endroit qu’il travaille actuellement. Dans le cas des deux affectations, la zone de l’administration centrale a été modifiée au moment de l’affectation à l’autre lieu de travail, car il s’agissait des lieux de travail réguliers auxquels il se présentait et effectuait son travail.
Le représentant a précisé qu’à ce sujet, la position présentée par le fonctionnaire s’estimant lésé et l’agent négociateur comporte une incohérence. Il a été affirmé dans la procédure de règlement de grief du CNM au palier précédent que l’Unité G était le lieu de travail permanent et que, par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé était en déplacement à l’extérieur de la zone de son administration centrale lorsqu’il travaillait à l’Unité H. Cependant, le lieu de travail permanent ou régulier avant la demande de mesures d’adaptation était l’Unité F au centre-ville de Ville C, en Province M. Le fonctionnaire s’estimant lésé et l’agent négociateur semblent convenir que des modifications du lieu de travail permanent et de la zone de l’administration centrale ont été faites lorsque le fonctionnaire s’estimant lésé est parti de l’Unité F pour aller travailler à l’Unité G, mais refusent d’accepter cette logique quant à son départ de l’Unité G pour l’Unité H.
Le représentant a souligné que malgré le déploiement non officiel cité comme catalyseur pour le statut de déplacement, cet aspect n’a pas été précisé au moment du changement de lieu de travail initial de l’Unité F à l’Unité G. Aucun déploiement n’a eu lieu; tout a été fait en conformité avec le processus d’obligation de prendre des mesures d’adaptation. Le représentant a soutenu qu’en réalité, le fonctionnaire s’estimant lésé occupe le même poste depuis 2002.
Le représentant a précisé qu’il semble qu’au bout du compte, le fonctionnaire soit en désaccord avec le mécanisme utilisé pour faciliter le changement de lieu de travail de l’Unité G à l’Unité H, soit le changement de centre de coûts plutôt qu’un déploiement en bonne et due forme. Un changement de centre de coûts est une mesure organisationnelle et de classification qui relève directement de la discrétion de la direction et il ne déclenche aucun droit en vertu de la Directive sur les voyages du CNM.
Le représentant a également souligné que dans la Directive sur les voyages, rien ne justifie l’indemnisation d’un employé au chapitre de ses déplacements quotidiens pour se rendre au travail et en revenir, car la distance normale parcourue pour se rendre au travail n’est pas jugée un voyage en service commandé.
En dernier lieu, le représentant a fait état de plusieurs décisions antérieures du CNM et de la CRTESPF à l’appui de la position de l’employeur (Taticek c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada) [2015 CRTEPF 12], Wurdell c. Agence canadienne d’inspection des aliments [2002 CRTFP 27], Hamilton et Hutchinson c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada) [2013 CRTFPF 91], CNM 21.4.1093 [le 6 avril 2016]).
Le représentant a répété que le grief ne concernait pas la compétence du CNM et qu’il devrait être rejeté pour des motifs administratifs. De plus, en ce qui a trait au bien-fondé du grief, le représentant de l’employeur a soutenu que puisque le fonctionnaire s’estimant lésé avait été traité dans l’esprit de la Directive sur les voyages, le grief devrait être rejeté et les mesures correctives demandées ne devraient pas être accordées.
Décision du Comité exécutif
Le Comité exécutif a examiné le rapport du Comité des voyages en service commandé et souligné qu’il ne pouvait établir un consensus quant à savoir si le fonctionnaire s’estimant lésé a été traité dans l’esprit de la Directive sur les voyages. Le Comité exécutif n’a pas été en mesure d’établir un consensus quant à cet enjeu. Par conséquent, le Comité exécutif est dans l’impasse.