le 3 février 2021

21.4.1128

Contexte

Le fonctionnaire s’estimant lésé est employé au Ministère X à Ville A, Province F. Le fonctionnaire s’estimant lésé a voyagé en service commandé à l’extérieur de sa zone d’affectation les 2, 8, 9, 23, 24 et 29 mai 2017. Ces jours-là, le fonctionnaire s’estimant lésé voyageait de 5 h 45 à 17 h 10 ou 17 h 55, selon les heures supplémentaires effectuées.

Le 13 juin 2017, le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté une demande d’indemnité de déplacement afin de recevoir un paiement des indemnités de repas pour le déjeuner, le dîner et le souper. L’employeur a approuvé le paiement des indemnités de repas pour le déjeuner et le dîner, mais il a refusé celle pour le souper. Par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté un grief le 18 juillet 2017.

Grief

L’employé conteste le fait qu’on a refusé de lui verser une indemnité pour le souper, alors qu’il se trouvait en service commandé à l’extérieur de sa zone d’affectation pendant 11,5 heures par jour et qu’il était donc arrivé à la maison une heure et demie plus tard qu’à l’habitude pendant plusieurs jours. En temps normal, le fonctionnaire s’estimant lésé arrive à la maison vers 15 h 30; toutefois, alors qu’il se trouvait en service commandé, il était arrivé après 17 h, ce qui a considérablement modifié ses habitudes de vie. Un autre employé du ministère a vécu la même situation et on lui a versé son indemnité pour le souper. Cet autre employé était arrivé à la maison vers 18 h, alors qu’il arrivait habituellement à 16 h 30, ce qui correspond à une heure et demie plus tard qu’à l’habitude, et on lui a versé une indemnité pour le souper.

De plus, cet autre employé se trouvait en service commandé pendant 11 heures et avait reçu l’indemnité pour le souper, tandis que le fonctionnaire s’estimant lésé se trouvait en service commandé pendant 11,5 heures et on lui a pourtant refusé l’indemnité pour le souper.

Présentation de l’agent négociateur

Le représentant de l’agent négociateur estime que la décision de l’employeur ne peut pas être justifiée au regard des faits et qu’elle ne correspond pas à l’esprit de la Directive sur les voyages. Le représentant a indiqué que la Directive vise à permettre à l’employé de demander l’indemnité de repas s’il est en service commandé au moment habituel de son repas. Le représentant a insisté sur le fait que l’utilisation du mot « doit » au paragraphe 3.2.9 de la Directive sur les voyages signifie que l’obligation de l’employeur est déclenchée une fois que l’employé est en service commandé au moment habituel de son repas, soit à 17 h dans le présent cas.

Le représentant a fait remarquer que l’employeur n’a pas contesté le fait que le fonctionnaire s’estimant lésé se trouvait en service commandé aux dates en question et que les heures auxquelles le fonctionnaire s’estimant lésé était retourné à sa résidence aux dates indiquées dans ce grief n’avaient soulevé aucun problème.

Le représentant a aussi soutenu que le refus de l’indemnité pour le souper ne correspond pas à l’esprit de la Directive, en particulier aux principes de souplesse et de transparence. En renvoyant à la réponse au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, le représentant a affirmé que l’employeur avait déterminé que l’heure raisonnable du repas de l’employé était 18 h et lui avait donc versé une indemnité pour les dates où il était rentré à la maison à cette heure ou plus tard. Toutefois, il avait refusé de lui verser l’indemnité pour la date à laquelle il était arrivé à la maison à 17 h 55, ce qui va à l’encontre du principe de souplesse pour répondre aux besoins et satisfaire aux intérêts de l’employé, selon le représentant. Ces dates ne font pas partie du présent grief, étant donné qu’une indemnité a été versée. Le représentant a indiqué que l’employeur devrait prendre en considération la situation particulière et les perturbations des routines quotidiennes de chaque employé. Il a été mentionné que la Directive sur les voyages ne précise aucun moment pour le souper; toutefois, le représentant ne croit pas que le fait de permettre à l’employeur de déterminer unilatéralement une heure de repas raisonnable pour verser une indemnité à un employé pour son repas respecte l’esprit de la Directive.

En ce qui concerne la transparence, le représentant de l’agent négociateur a fait remarquer que l’employeur avait remboursé un autre employé dans une situation semblable en 2015. Le représentant a indiqué que l’employé dans ce cas rentrait habituellement à la maison à 16 h 30, qu’il prenait son repas à 17 h 30 et qu’il avait demandé une indemnité pour une journée où il était rentré à la maison à 18 h, soit à peine 30 minutes après son heure de repas habituelle, et qu’il avait obtenu l’indemnité du repas. Le représentant a indiqué que la demande de remboursement avait été refusée au départ, étant donné qu’il s’agissait d’un retard d’à peine 30 minutes. Le gestionnaire national des déplacements du ministère avait envoyé un courriel au syndicat et aux employés, dans lequel il indiquait que l’employeur devait faire preuve de souplesse et tenir compte de la situation personnelle de l’employé et que, dans ce cas, l’employé était parti tôt et rentré tard à la maison, ce qui signifiait donc que l’employeur devait tendre à rembourser la demande d’indemnité pour le souper. Le représentant a indiqué que l’employé en question avait effectivement obtenu l’indemnité et que cela indiquait qu’il s’agissait de la norme au ministère, à la lumière de la position du gestionnaire national des déplacements.

Le représentant a comparé les deux situations. Dans l’affaire précédente, l’employé se trouvait en service commandé pendant 11 heures, tandis que le fonctionnaire s’estimant lésé dans le grief en question se trouvait en service commandé pendant 11 heures et 35 minutes à 12 heures et 5 minutes. Dans la situation précédente, l’employé ayant obtenu l’indemnité était rentré à la maison 30 minutes après son heure de repas habituelle, tandis que le fonctionnaire s’estimant lésé dans cette situation était rentré à la maison au moins 90 minutes et jusqu’à deux heures plus tard qu’à l’habitude, ce qui doit être considéré comme une perturbation de sa routine quotidienne.

Étant donné que l’employeur a refusé de verser cette indemnité pour le souper alors qu’il l’a versée deux ans plus tôt, le représentant a affirmé que l’employeur avait fait preuve d’un manque d’uniformité, d’équité et d’égalité dans la mise en application de la Directive. Le représentant a indiqué que l’employeur n’avait fourni aucune explication pour ce traitement différent.

En conclusion, le représentant a affirmé que le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas été traité conformément à l’esprit de la Directive, étant donné qu’il n’avait pas obtenu une indemnité pour un repas, et ce, même s’il était en service commandé pendant son heure de repas habituelle. En outre, le représentant a indiqué que la décision de l’employeur de ne pas rembourser le fonctionnaire s’estimant lésé va à l’encontre des principes de souplesse et de transparence de la Directive sur les voyages du CNM.

Par conséquent, le représentant de l’agent négociateur demande que le grief soit accueilli et le fonctionnaire s’estimant lésé soit remboursé pour son repas pour les dates demandées.

Présentation du ministère

Le représentant de l’employeur est d’accord avec l’information que le représentant de l’agent négociateur a donnée pendant sa présentation en ce qui concerne les lieux où le fonctionnaire s’estimant lésé travaille, où il était en affectation, ainsi que les dates pour lesquelles le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté des demandes de remboursement. Le représentant a souligné le fait que le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté deux demandes de remboursement des frais distinctes, l’une pour les dates visées par le présent grief, l’autre pour le mois de mai 2017 au complet.

Selon le fonctionnaire s’estimant lésé, il a présenté une demande de remboursement des frais pour le mois de mai 2017 à son superviseur en juin 2017. Une discussion verbale a eu lieu avec le superviseur, qui a demandé au fonctionnaire s’estimant lésé de créer une demande de remboursement distincte pour les dates visées par le présent grief. En juillet 2017, le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé un grief à l’encontre de l’employeur pour ces dates et a demandé de lui verser l’indemnité en raison de la longueur du déplacement.

Le représentant a indiqué que le témoignage du fonctionnaire s’estimant lésé à l’audience du premier palier de la procédure de règlement des griefs portait essentiellement sur la perturbation de sa routine, soit le temps passé avec ses enfants et sa pratique de se reposer avant de manger. Toutefois, l’heure de repas habituelle demeurait la même. À l’audience du deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, le représentant a indiqué que le repas avait été volontairement reporté afin de garder sa routine.

Le représentant de l’employeur affirme que le fonctionnaire s’estimant lésé a reçu un traitement équitable et conforme aux dispositions prévues dans la Directive sur les voyages du CNM. Étant donné que l’employeur estimait qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que le fonctionnaire s’estimant lésé prenne son repas à sa résidence, celui-ci avait déjà obtenu toutes les indemnités de repas applicables pour la période en question. En outre, lors des audiences au premier et au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, le fonctionnaire s’estimant lésé a confirmé que, même s’il était arrivé plus tard qu’à l’habitude à la maison et que sa routine avait été perturbée, le souper n’avait pas été touché.

Dans le grief, le représentant a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé avait dit être en service commandé pendant onze heures et demie, ce qui signifiait qu’il était rentré à la maison après 17 h et que l’employeur avait refusé de lui verser une indemnité pour le souper. De plus, le fonctionnaire s’estimant lésé a indiqué qu’un collègue qui avait été en service commandé pendant 11 heures avait obtenu son indemnité pour le souper.

Le représentant a soutenu que la durée du service commandé ne constitue pas le facteur déterminant du remboursement du repas. En effet, l’employeur doit prendre en considération le caractère raisonnable de la demande de remboursement, ce qui a été fait dans cette affaire. Selon l’employeur, il était raisonnable pour le fonctionnaire s’estimant lésé de prendre son repas à la maison, étant donné l’heure à laquelle il était arrivé. Le représentant a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé avait confirmé cette hypothèse lors des audiences tenues aux précédents paliers de la procédure de règlement des griefs. Il a également été mentionné que le fonctionnaire s’estimant lésé ne s’était pas acheté de repas, n’avait fourni aucun reçu de repas et n’avait pas manqué son repas à sa résidence. En fait, le fonctionnaire s’estimant lésé a indiqué dans son témoignage qu’il était arrivé à la maison à temps pour le souper, mais qu’il l’avait repoussé pour se reposer et pour jouer avec ses enfants avant.

Il a été mentionné que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a présenté aucune raison à l’appui de l’indemnité pour le souper. Il a seulement indiqué qu’un collègue avait obtenu une indemnité pour un déplacement d’une durée similaire.

Le représentant de l’employeur a cité des précédents en ce qui concerne le caractère raisonnable au sein du CNM, en particulier l’affaire 21.4.1047, dans laquelle le Comité exécutif avait rejeté le grief au motif qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que l’employé soupe à la maison les jours en question, étant donné l’heure de son arrivée. Dans ce cas, la décision a été maintenue, même si le fonctionnaire s’estimant lésé se trouvait en service commandé à l’extérieur de sa zone d’affectation pendant plus de 11 heures. Dans un deuxième précédent (21.4.1065), le Comité exécutif avait aussi conclu, au moment de rejeter le grief, qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que l’employé soupe à la maison étant donné l’heure de son arrivée, et ce, même si son service commandé avait également duré 11 heures.

En conclusion, le représentant de l’employeur a affirmé que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été traité conformément à l’esprit de la Directive sur les voyages, qu’il était raisonnable pour l’employeur de s’attendre à ce que le fonctionnaire s’estimant lésé soupe à sa résidence, étant donné l’heure de son arrivée, et que le fonctionnaire s’estimant lésé avait obtenu un traitement équitable.

Par conséquent, le représentant a demandé de rejeter ce grief.

Décision du Comité exécutif

Le Comité exécutif a examiné le rapport du Comité des voyages en service commandé, qui a conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été traité conformément à l’esprit de la Directive sur les voyages. Le Comité exécutif a convenu que, compte tenu de toutes les variables, et soulignant que l’heure d’arrivée n’est qu’un aspect, il n’était pas déraisonnable pour l’employeur de s’attendre à ce que le fonctionnaire mange son repas à sa résidence et qu’il ne soit plus, par conséquent, en service commandé au moment de son repas. Par conséquent, le grief est rejeté.