le 29 septembre 2021
41.4.139
Contexte
Le fonctionnaire s’estimant lésé est employée au Ministère X à Ville A, au Province M, et son époux a été muté au Province N en 2019. Le voyage à la recherche d’un logement (VRL) de son conjoint a été approuvé par son ministère le 12 juillet 2019 et devait commencer six jours plus tard, pour la période du 18 au 21 juillet 2019.
Le 4 juillet 2019, le fonctionnaire s’estimant lésé a demandé deux jours de congé pour obligations familiales, puisque sa convention collective ne prévoyait pas de congé pour la réinstallation du conjoint. Le 9 juillet 2019, le fonctionnaire s’estimant lésé a demandé s’il aurait droit à un congé pour la réinstallation du conjoint en vertu du paragraphe 2.4.3 de la Directive sur la réinstallation du CNM (la Directive), au lieu d’exiger qu’il utilise un congé pour obligations familiales.
Dans le courriel refusant sa demande de congé le 17 juillet 2019, soit la veille du VRL, l’employeur a déclaré qu’en raison de l’incapacité de couvrir ses quarts de travail à cause du court préavis, des congés d’été et des quarts de fin de semaine supplémentaires mis en œuvre en juin 2019 pour la protection en matière de santé mentale, le congé a été refusé. Il a toutefois été confirmé qu’il serait en mesure de prendre du temps à une date ultérieure en vertu de la Directive, à condition qu’il donne un préavis suffisant.
Grief
Le fonctionnaire conteste le refus de l’employeur de lui accorder le congé nécessaire pour mener à bien toutes les activités liées à la réinstallation de son conjoint. Le fonctionnaire s’estimant lésé affirme que cela contrevient à sa convention collective, y compris, mais sans s’y limiter, à l’article 35 (ententes du Conseil national mixte) et à la Directive sur la réinstallation du CNM.
Présentation de l’agent négociateur
Le représentant de l’agent négociateur a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé s’était vu refuser deux (2) jours d’autres congés payés pour un VRL en raison de la réinstallation du conjoint du fonctionnaire s’estimant lésé par son ministère. Il a déclaré que ce refus constitue une violation de la convention collective et des principes de la Directive sur la réinstallation.
Le représentant a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas été traité avec respect tout au long du processus. Le représentant a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé avait informé ses gestionnaires le 30 avril 2019 que son conjoint avait été transféré. Dans un courriel de suivi daté du 4 juillet 2019, il indiquait qu’ils avaient eu une discussion le matin même, et que le VRL ne pourrait avoir lieu qu’à ce moment-là. Le représentant a indiqué que le gestionnaire aurait dû informer le fonctionnaire s’estimant lésé qu’il reconnaissait l’importance de l’événement dans sa vie et prendre des dispositions pour que le fonctionnaire s’estimant lésé ait ce congé. Toutefois, le représentant a indiqué que le gestionnaire n’avait fait aucun effort pour prendre les dispositions nécessaires pour assurer la couverture de ses quarts de travail.
Le représentant a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé avait entendu dire qu’il avait droit à un congé pour VRL en vertu de la Directive sur la réinstallation le 9 juillet 2019. Il a fait remarquer que l’article est un article non discrétionnaire, la seule réserve étant les exigences opérationnelles. Il a indiqué que, lorsque le fonctionnaire s’estimant lésé s’est adressé aux Relations de travail, il a été renvoyé à son gestionnaire, qui n’avait pas du tout répondu à sa demande à ce stade. Il a ajouté que si l’employeur avait demandé aux employés de faire des heures supplémentaires et que personne n’avait voulu le faire, l’argument des exigences opérationnelles pourrait être avancé, mais puisqu’une telle demande n’a pas été présentée, invoquer les exigences opérationnelles dans le refus d’accorder le congé dans cette situation est inapproprié.
Le représentant a indiqué que le matin du 17 juillet, le fonctionnaire s’estimant lésé a de nouveau communiqué avec son gestionnaire au sujet de son congé et que, encore une fois, il n’a reçu aucune réponse de son gestionnaire. Il a indiqué que c’est à ce moment-là que le fonctionnaire s’estimant lésé a été avisé qu’il avait demandé le mauvais type de congé et qu’il devait présenter sa demande au directeur régional pour approbation. Le représentant a affirmé que le directeur régional avait exercé son pouvoir discrétionnaire de manière inappropriée, puisqu’il n’avait pas cherché de moyens de répondre à la demande, s’appuyant plutôt fortement sur le caractère tardif de la demande. Le représentant a indiqué que le cœur du problème et du grief est que le gestionnaire savait quand le fonctionnaire s’estimant lésé devait voyager et n’a rien fait pour assurer la couverture de ses quarts de travail.
Le représentant de l’agent négociateur a indiqué que l’un des arguments de l’employeur sera que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas droit à un remboursement du congé puisqu’il n’a pas pris de congé. Il a déclaré que le fonctionnaire s’estimant lésé a été forcé de modifier l’itinéraire de quatre (4) jours qu’il avait prévu avec un agent immobilier pour tenter de s’établir dans un marché très actif, ce qui a rendu l’épreuve stressante et pénible. Il a toutefois affirmé que, puisque l’employeur a refusé de façon incorrecte le congé, il devrait y avoir une certaine conséquence pour l’employeur, invoquant Nolan c. Secrétariat du Conseil du Trésor, où l’arbitre a ordonné à l’employeur de payer au fonctionnaire s’estimant lésé huit (8) jours de congé au lieu d’accorder un congé, puisque le fonctionnaire s’estimant lésé ne travaillait plus pour le ministère, comme dans la situation actuelle. De plus, Brown c. Secrétariat du Conseil du Trésor souligne l’importance d’appliquer les principes et de reconnaître l’incidence des décisions sur la vie des gens. Le représentant a également fait référence à Hester c. Secrétariat du Conseil du Trésor, où il a été déterminé que l’employeur avait effectué une évaluation inappropriée, déclarant que le refus d’un congé pour éviter de payer des heures supplémentaires constitue une infraction.
Le représentant a soutenu que le fonctionnaire s’estimant lésé et sa famille ont subi plus qu’un désagrément; ils ont été forcés de réorganiser tout leur voyage à la dernière minute. Par conséquent, compte tenu des faits et des arguments susmentionnés, le représentant de l’agent négociateur demande que le grief soit accueilli.
Dans les questions de précision, il a été soulevé que, comme le conjoint a été réinstallé en vertu d’une autre Directive, le fonctionnaire s’estimant lésé n’est pas visé par la Directive sur la réinstallation du CNM. Cependant, le représentant a fait valoir que, selon la définition de fonctionnaire prévue par la Directive, un fonctionnaire est une personne dont le salaire est payé des Fonds consolidé de revenue du Canada, ce qui est une qualification générale à satisfaire pour que la Directive s’applique à un conjoint.
Présentation du ministère
Le représentant de l’employeur a examiné les mesures correctives demandées par le fonctionnaire s’estimant lésé, à savoir que l’employeur reconnaisse l’effet que ce refus d’accorder un congé a eu sur lui et sa famille; que l’employeur déclare avoir contrevenu à la convention collective; que l’employeur rétablisse 15 heures (deux jours) de crédits de congé dans sa banque de congés; qu’il soit indemnisée intégralement; ainsi qu’une demande ultérieure que l’employeur affiche la décision en milieu de travail.
Le représentant a indiqué que la première mesure corrective concernant la reconnaissance de l’effet du refus d’accorder le congé a été fournie dans les réponses à tous les paliers du processus de règlement des griefs à ce jour. Il a également indiqué que l’employeur a reconnu à plusieurs reprises que le fonctionnaire s’estimant lésé avait droit à un congé en vertu du paragraphe 2.4.3 de la Directive. Toutefois, puisque le fonctionnaire s’estimant lésé a finalement réduit son VRL à deux (2) jours seulement et qu’il n’a pris aucun congé supplémentaire, le représentant a soutenu qu’un fonctionnaire ne devrait pas être indemnisé sans avoir subi des pertes ou des dommages mesurables.
Le représentant a cité le grief du CNM 41.4.11, dans lequel le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas été traité conformément à l’esprit de la Directive lorsque le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas été remboursé pour des dépenses personnelles qu’il avait engagées. Dans ce grief, le représentant a indiqué que le Comité exécutif avait accueilli le grief, faisant valoir que cette décision démontrait l’intention de la Directive de s’assurer que les fonctionnaires soient remboursés pour les dépenses personnelles.
Tout en reconnaissant que le CNM n’est pas lié par les décisions de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (CRTESPF), le représentant a mis de l’avant Benson c. Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT). Dans cette décision, l’employeur a reçu l’ordre de rétablir le congé non payé pour obligations personnelles qui avait été utilisé au lieu du congé pour réinstallation du conjoint en raison d’une interprétation erronée de la convention collective applicable par l’employeur. Le représentant a soutenu que cette décision confirme que pour que des crédits de congé soient accordés ou rétablis, le congé doit avoir été utilisé, ce qui n’est pas le cas dans le présent grief. Le représentant a ajouté qu’il était soutenu dans Nolan c. SCT que le congé devait avoir été utilisé. Il a également soutenu que Brown c. SCT n’est pas pertinente puisqu’il s’agit d’un droit de l’employeur d’exercer un pouvoir discrétionnaire.
Le représentant a réitéré que les mesures correctives demandées par le fonctionnaire s’estimant lésé ont déjà été accordées dans la mesure du possible. L’employeur a reconnu à plusieurs reprises l’effet sur le fonctionnaire s’estimant lésé et sa famille. Le représentant a indiqué que la seule autre mesure corrective qui peut raisonnablement être accordée est une déclaration selon laquelle l’employeur a contrevenu à la convention collective. Pour finir, le représentant a indiqué que si l’employeur devait afficher la décision, celle-ci pourrait être préjudiciable à l’employeur aux yeux du personnel, si elle était défavorable, et que c’était également inutile, puisque toutes les décisions du CNM sont accessibles en ligne à tous.
En conclusion, le représentant de l’employeur a fait valoir que, même si la situation n’était pas idéale pour le fonctionnaire s’estimant lésé, ce dernier a quand même réussi à participer à son VRL. De plus, le conjoint a terminé sa réinstallation avec le fonctionnaire s’estimant lésé, qui a depuis quitté le ministère. Il a soutenu que le préjudice causé au fonctionnaire s’estimant lésé était minime, qu’il s’agissait simplement d’un inconvénient sans dommage mesurable, ce qui ne lui donne pas droit à une réparation pécuniaire ou à un autre avantage.
Par conséquent, le représentant demande que le grief soit rejeté.
Décision du Comité exécutif
Le Comité exécutif a examiné le rapport du Comité sur la réinstallation, qui a conclu qu’étant donné que la personne qui se réinstallait était visée par une autre directive, le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait jamais fait l’objet de la Directive sur la réinstallation, et que, par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé n’a droit à aucune indemnité en vertu de cette Directive. Par conséquent, le grief est théorique.
Le Comité exécutif a cependant souligné que le manque de soutien offert par le ministère au cours de cette période stressante est préoccupant. Il encourage le Ministère à clarifier les processus de gestion et à mettre en œuvre des mesures correctives, afin de s’assurer que ce genre de situation ne se reproduira plus, tout en faisant remarquer qu’il est raisonnable que les fonctionnaires soient adéquatement soutenus dans les mêmes situations et que l’employeur réponde en temps utile aux demandes de congé.