le 16 mai 2003

20.4.205, 20.4.206

Les fonctionnaires avaient déposé des griefs pour contester la décision de l'employeur de les obliger à porter des vêtements civils (qui leur appartenaient) pour des opérations secrètes. Ils avaient demandé que l'employeur prenne des dispositions pour leur fournir des vêtements en application de la Directive sur les uniformes (clause 12.2) et de la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle (clause 3.2), qu'il leur verse immédiatement une indemnité d'habillement ou prenne toutes les autres mesures jugées appropriées dans les circonstances.

Dans le cadre de leurs fonctions, les fonctionnaires s'estimant lésés doivent porter un uniforme, que l'employeur leur fournit et qu'il paie, et qui les identifie à titre d'agents. Toutefois, pendant une petite partie de l'année, l'employeur demande aux fonctionnaires s'estimant lésés (le premier fonctionnaire : 2 % du temps en 2002; le deuxième fonctionnaire : 12 % du temps en 2002) de prendre part à des opérations d'infiltration et de porter, à cette occasion, des vêtements civils (qui leur appartiennent), de façon qu'on ne puisse les identifier. Dans le cadre de ces opérations d'infiltration, les fonctionnaires s'estimant lésés sont appelés à ramper au sol, à se cacher dans les buissons ou dans des embarcations ou des immeubles abandonnés, entre autres choses. Leurs vêtements, en plus de devoir être suffisamment grands pour dissimuler un gilet pare-balles, du Mace, des menottes, des lampes de poche, etc., sont souvent déchirés et salis. C'est relativement aux opérations au cours desquelles ils doivent porter des vêtements civils que les fonctionnaires s'estimant lésés demandent qu'on leur verse une indemnité ou qu'on leur fournisse des vêtements civils puisque, soutiennent-ils, ils ne devraient pas assumer ces dépenses.

La représentante de l'agent négociateur explique d'abord le type de travail que les fonctionnaires s'estimant lésés exécutent et fournit des renseignements détaillés sur les conditions dans lesquelles ils travaillent lorsqu'ils participent à des opérations d'infiltration. Elle renvoie à maintes reprises à la description de travail, soulignant des aspects comme l'effort physique, les conditions de travail et, plus particulièrement, l'environnement de travail et les risques à la santé.

La représentante de l'agent négociateur indique que le Comité national sur l'habillement du ministère a abordé la question d'une indemnité pour les vêtements civils (vêtements personnels). Elle renvoie au compte rendu d'une réunion qui s'est tenue les 21 et 22 avril 1999 et au cours de laquelle le comité a recommandé qu'une indemnité d'habillement soit prévue pour les agents d'enquêtes spéciales des régions. Le compte rendu d'une autre réunion du Comité, tenue du 4 au 6 octobre 1999, indique que « M. ... a vérifié auprès du Conseil du Trésor et a été informé que l'indemnité d'habillement pour les agents portant des vêtements civils ne pose aucune difficulté, puisque les membres de la GRC touchent une indemnité d'habillement pour des tâches semblables. La demande doit être faite sous forme de présentation au CT, signée par le sous-ministre ».

La représentante de l'agent négociateur mentionne que, si le ministère a convenu de verser aux agents d'enquêtes spéciales qui effectuent à temps plein des opérations d'infiltration une indemnité d'habillement, pourquoi ne verserait-il pas la même indemnité au type d'agents en cause ici, même si les opérations d'infiltration représentent une faible portion de leurs tâches. Elle renvoie aux agents de la GRC, qui touchent une indemnité d'habillement pour les vêtements civils.

La représentante de l'agent négociateur indique que l'employeur a contrevenu à l'article 1.1 de la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle au motif qu'il ne s'est pas assuré que tous les employés exposés à des dangers dans le cadre d'opérations d'infiltration portent ou utilisent l'équipement conformément à la directive.

La représentante de l'agent négociateur indique que le ministère a manqué à l'article 1.3 de la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle au motif qu'il n'a pas consulté les comités de sécurité et de santé au travail pour déterminer les besoins en matière d'équipement de protection individuelle pour les opérations d'infiltration.

La représentante de l'agent négociateur fait valoir que le ministère a contrevenu à l'article 3.1 de la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle au motif qu'il n'a pas fourni aux fonctionnaires s'estimant lésés des vêtements de protection appropriés, ni ne leur a versé d'indemnité à cet égard.

La représentante de l'agent négociateur fait valoir que l'employeur a manqué également aux dispositions relatives aux considérations spéciales contenues à l'article 3.2 de la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle.

La représentante de l'agent négociateur soutient que la directive est claire et que l'employeur devrait fournir gratuitement des vêtements de protection et les remplacer gratuitement lorsqu'ils ne sont plus utilisables. Le ministère n'en a rien fait, contrevenant ainsi aux dispositions de l'article 3.3 de la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle.

La représentante de l'agent négociateur indique que, dans sa réponse au premier palier, l'employeur a affirmé que les opérations d'infiltration ne satisfaisaient pas aux conditions énoncées à l'article 3.2 de la Directive. Elle fait valoir que cette décision est erronée, car l'employeur n'a invoqué aucune raison pour en arriver à une telle conclusion. Elle soutient également que l'employeur n'a pas respecté les conditions de l'Appendice A de la Directive – Dangers au travail, aux termes de laquelle, s'il existe des dangers, le fonctionnaire peut avoir besoin d'un équipement de protection. Elle donne des exemples de dangers auxquels les agents en question sont exposés : animaux, boîtes lourdes, caisses et paquets, espaces clos, équipement de transmission automatique, rebuts, débris et déchets, poussière, gaz, vapeurs, températures et pressions extrêmes d'origine naturelle ou industrielle, insectes, moisissure, bactéries, etc. Elle renvoie à la description de travail des fonctionnaires s'estimant lésés, qui indique clairement les dangers auxquels les fonctionnaires en question sont exposés.

La représentante de l'agent négociateur fait valoir que les dangers sont présents et que l'employeur en connaît l'existence puisqu'ils figurent dans la description de travail. Toutefois, l'employeur a choisi d'en faire abstraction puisqu'il a refusé de fournir des vêtements civils ou de verser une indemnité pour assurer la sécurité et la protection des fonctionnaires. En outre, la représentante de l'agent négociateur indique-t-elle, l'employeur sait que ces dangers font partie intégrante des enquêtes spéciales/opérations de surveillance pour infiltration, puisqu'il a convenu de verser une indemnité aux agents qui effectuent des enquêtes à temps plein. Elle fait valoir que l'employeur établit une distinction entre les agents d'enquêtes spéciales et le type d'agent en question ici, même si les deux groupes sont assujettis aux mêmes conditions. L'employeur a toujours refusé de fournir des vêtements civils, a omis de consulter les comités de sécurité et de santé au travail contrairement à ce que prévoit la Directive, et a rejeté les griefs à tous les paliers du processus de règlement des griefs.

La représentante de l'agent négociateur soutient que l'employeur a contrevenu à l'objet et à la portée de la Directive sur les uniformes. Les actions de l'employeur sont contraires aux exigences énoncées dans la Directive sur l'équipement et les vêtements de protection individuelle, ce qui contrevient à la Directive sur les uniformes. La représentante de l'agent négociateur indique également que le ministère n'a pas passé en revue de manière équitable et convenable ses politiques sur l'habillement pour s'assurer qu'elles étaient conformes à la Directive. Les actions et les décisions du ministère sont contraires à l'objet et à la portée de la Directive puisque ses pratiques ne protègent pas les fonctionnaires s'estimant lésés ni ne sont économiques et équitables, et elles ne se comparent pas non plus à celles qui sont en vigueur à l'échelle de la fonction publique ou à celles qui s'appliquent à l'égard d'emplois semblables en dehors de la fonction publique (p. ex. la GRC, la Sûreté du Québec, le Service correctionnel).

La représentante de l'agent négociateur indique que les actions du ministère, ou l'absence d'action de ce dernier, contreviennent aux dispositions de l'article 1.3 de la Directive sur les uniformes, au motif que le ministère ne s'est pas assuré que les consultations voulues aient lieu, avec la participation des comités sur la sécurité et la santé au travail, sur la question des vêtements civils pour ce genre d'agents dans le cadre d'opérations d'infiltration.

La représentante de l'agent négociateur soutient également que le ministère a contrevenu à l'article 2 de la Directive sur les uniformes au motif qu'il n'a pas consulté les représentants des fonctionnaires sur tous les plans. En outre, indique-t-elle, puisque les dangers sont inhérents aux opérations d'infiltration, les vêtements portés par les fonctionnaires s'estimant lésés devraient offrir une protection à ces derniers. Le ministère avait une obligation d'obtenir l'aide des comités de santé et de sécurité au travail ou de leurs représentants pour les besoins en matériel et en vêtements protecteurs, mais, d'après la représentante de l'agent négociateur, il ne s'est pas acquitté de cette obligation.

La représentante de l'agent négociateur indique que, bien que l'employeur se soit conformé aux dispositions de l'article 3.1 de la Directive sur les uniformes relativement aux agents d'enquêtes spéciales, qui exécutent des tâches semblables dans des conditions semblables, il n'en a rien fait pour le type d'agents en cause.

La représentante de l'agent négociateur fait valoir que, étant donné que des questions de santé et de sécurité se posent relativement à la situation des fonctionnaires s'estimant lésés, l'employeur a l'obligation de verser une indemnité ou de fournir les vêtements requis; il s'agit de circonstances spéciales (article 12.2). On reconnaît également que les vêtements personnels demandés ne sont pas essentiels à l'identification puisqu'il s'agit d'opérations d'infiltration, mais qu'ils sont nécessaires pour améliorer l'apparence générale et le confort des fonctionnaires s'estimant lésés.

La représentante de l'agent négociateur indique que, dans le cas d'agents d'enquêtes spéciales, on a obtenu l'approbation nécessaire avant de verser une indemnité. Elle fait valoir que, conformément à l'article 13 de la Directive sur les uniformes, le ministère peut obtenir une indemnité d'habillement pour les fonctionnaires s'estimant lésés lorsqu'ils doivent porter des vêtements civils au cours d'opérations d'infiltration.

La représentante de l'agent négociateur fait valoir que l'employeur a implicitement reconnu les dangers liés au travail des fonctionnaires s'estimant lésés puisqu'il fournit un équipement de protection individuelle comme des chaussures, des chapeaux, des lunettes de soleil, des gilets de sauvetage, etc. Elle indique que l'employeur est celui qui exige des fonctionnaires s'estimant lésés qu'ils portent des vêtements civils.

La représentante de l'agent négociateur met un terme à la présentation en soutenant qu'il est clair que les fonctionnaires s'estimant lésés ont été traités d'une manière qui ne respecte pas l'esprit des deux directives. Elle demande donc que les griefs soient accueillis et que les actions correctives demandées soient accordées.

La représentante ministérielle indique que la Directive sur les uniformes s'applique au ministère et qu'elle est claire : l'objet et la portée de la directive consistent à aider les ministères à s'assurer que leurs pratiques permettent de protéger et d'identifier convenablement les fonctionnaires. La représentante ministérielle fait valoir que, sous la rubrique intitulée Fonctions, la Directive établit clairement que les uniformes et autres articles d'identification sont fournis gratuitement. Elle indique que, lorsque la nature des tâches exécutées par un fonctionnaire exige que celui­-ci soit identifié pour montrer l'autorité dont il est investi, l'uniforme est nécessaire pour bien faire connaître ses fonctions. La représentante ministérielle indique que l'article 7.7 de la Directive sur les uniformes énonce l'obligation du fonctionnaire de faire nettoyer son uniforme, de le repasser et de le raccommoder.

La représentante ministérielle fait valoir que l'article 12 de la Directive sur les uniformes porte spécifiquement sur les vêtements personnels. La Directive prévoit que les ministères peuvent, dans des circonstances particulières, payer les vêtements personnels ou prendre des dispositions permettant aux fonctionnaires d'acheter des quantités raisonnables de vêtements personnels; cependant, il n'impose aucune obligation de payer des vêtements personnels en tout temps. En outre, l'article 13.3 prévoit qu' « on ne verse aucune indemnité pour [...] les vêtements personnels ».

La représentante ministérielle soutient que, pour avoir une politique relative au remboursement du coût des vêtements personnels, le ministère doit faire des présentations au Conseil du Trésor. On indique qu'une telle présentation est en voie d'élaboration relativement aux agents qui travaillent au sein de l'unité des enquêtes spéciales à temps plein. En principe, l'indemnité pour les vêtements personnels serait équivalente au coût de l'uniforme. La représentante indique que, dans ce cas-ci, les fonctionnaires s'estimant lésés répondent à la description d'un certain type d'agents à temps plein et portent un uniforme payé par le ministère. Cependant, ils sont parfois appelés à prendre part à des opérations d'infiltration, approximativement 60 jours par année. Pour préserver la nature secrète de ces opérations, les fonctionnaires s'estimant lésés doivent porter des vêtements décontractés qui conviennent dans les circonstances; porter des vêtement civils ne constitue pas une condition à plein temps.

La représentante ministérielle fait valoir que, parce que les fonctionnaires s'estimant lésés ne doivent porter des vêtements personnels qu'à l'occasion dans le cadre de leurs fonctions, le ministère a déterminé que, suivant l'esprit de la Directive, il n'était pas tenu de verser une indemnité d'habillement.

Elle fait valoir également que, de manière générale, les employés de la fonction publique ne touchent aucune indemnité pour leurs vêtements.

En conclusion, la représentante ministérielle indique que l'on a respecté l'esprit de la Directive sur les uniformes.

Le Comité exécutif prend connaissance du rapport du Comité de la sécurité et de la santé au travail, mais n'arrive pas à s'entendre sur l'esprit des directives, de sorte qu'il conclut à l'impasse.