le 16 février 2005
20.4.215
La fonctionnaire a déposé un grief parce que la direction ne s'acquitte pas de son obligation de fournir un milieu de travail sûr et, en particulier, de son obligation d'offrir un autre lieu de travail durant une panne d'électricité lorsque la température dans les bureaux est inférieure aux normes prescrites par la Directive sur l'utilisation et l'occupation des bâtiments du Conseil national mixte. Elle a également déposé un grief parce qu'elle a été contrainte d'utiliser des crédits de congé de maladie ou de congé annuel pour le temps non travaillé le jour de la panne et le jour suivant en raison de cette situation. Elle demande qu'une pleine rémunération lui soit versée pour tout le temps non travaillé, sans déduction de ses crédits de congé de maladie ou de congé annuel et que les documents physiques concernant le grief soient supprimés de son dossier personnel.
Le représentant de l'agent négociateur explique que la fonctionnaire s'estimant lésée travaille comme agent dans la ville Y. Le 16 octobre 2003, le bureau a été privé d'électricité ou de chauffage de 5 h jusqu'à 10 h et quelques minutes. Le personnel aurait initialement reçu instruction de l'administration régionale de rester dans l'immeuble. La fonctionnaire s'estimant lésée s'est présentée au travail à 7 h. On l'a priée d'attendre dans le hall d'entrée, où il faisait froid en raison du vent, de la pluie et des gens qui allaient et venaient par les portes vitrées. Vers 7 h 45, la fonctionnaire s'estimant lésée et d'autres employés ont été dirigés vers la salle d'attente réservée au public. À 8 h 20, la fonctionnaire s'estimant lésé s'est rendue à son poste de travail. Elle est restée assise au froid pendant plus de trois heures en plus d'être exposée à des bourrasques de vent pendant une heure environ.
Au dire de la fonctionnaire s'estimant lésée, comme le bureau est muni de thermostats électriques programmables, la chaleur n'est par revenue immédiatement après le retour du courant. Il a fait froid dans l'immeuble pendant plus de cinq heures. À cause de problèmes continus de chauffage dans l'immeuble ayant une incidence négative sur sa santé, la fonctionnaire s'estimant lésée vérifie régulièrement le thermostat qui se trouve au-dessus de son poste de travail. Durant la panne de courant, la température est demeurée à 14oC de 8 h 20 à 10 h 10.
Le représentant de l'agent négociateur indique que la fonctionnaire s'estimant lésée a informé le chef d'équipe par trois fois qu'il faisait trop froid dans le bureau sans qu'aucune solution de rechange ne soit proposée. À 9 h 15, l'employeur a indiqué aux employés que ceux qui avaient trop froid pouvaient se rendre au centre commercial et y prendre une pause prolongée. À cause de l'effet du froid ambiant sur son bien-être physique, la fonctionnaire s'estimant lésée a quitté le bureau ce jour-là à 10 h 30 et est restée chez elle le lendemain, c'est-à-dire le vendredi 17 octobre 2003. Son absence était directement attribuable au fait qu'elle était restée assise plus de trois heures au froid dans le bureau le 16 octobre 2003.
Le représentant de l'agent négociateur observe que peu importe que l'employeur ait fait ou non des efforts pour remédier à la situation, les conditions ambiantes dans le bureau ne respectaient pas les normes établies. Au paragraphe 17.3.2.b) de la directive du CNM, il est clairement indiqué que « les conditions sont considérées comme insatisfaisantes si [...] la température [...] tombe au dessous de 17oC. Dans ces cas, l'employeur devra cesser ses activités et permettre aux employés de quitter le lieu de travail s'il n'est pas possible de les réaffecter à un autre endroit. » Or, cela n'a pas été fait. La fonctionnaire s'estimant lésée ne devrait pas être pénalisée dans les circonstances en étant obligée d'utiliser ses congés de maladie ou ses congés annuels à cause des conditions ambiantes dans le bureau.
Le représentant de l'agent négociateur indique que la Directive du CNM sur l'utilisation et l'occupation des bâtiments tient compte des exigences minimales de la partie II du Code canadien du travail. Au paragraphe 17.3.2 de la directive, il est précisé que « dans les bureaux, la température [...] pendant les heures de travail devrait être maintenue entre 20oC et 26oC » et que « des températures se situant entre 17oC et 20oC ainsi qu'au dessus de 26oC peuvent être inconfortables, et les employés ne devraient pas y être exposés plus de 3 heures par jour ».
L'employeur a refusé d'accorder un congé payé pour d'autres motifs en vertu du paragraphe 53.01 de la convention collective. La fonctionnaire s'estimant lésée a donc été contrainte d'utiliser ses crédits de congé annuel pour les absences dues à des problèmes médicaux directement attribuables à la panne de courant du 16 octobre 2003.
Le représentant de l'agent négociateur termine en disant que selon la Directive sur l'utilisation et l'occupation des immeubles, il est interdit de demander ou de permettre à un employé d'utiliser un bâtiment d'une façon qui puisse compromettre la sécurité ou la santé de cet employé ou de toute autre personne.
Il est incontestable que les circonstances à l'origine des absences des 16 et 17 octobre n'étaient pas directement attribuables à la fonctionnaire s'estimant lésée. Cette dernière a des antécédents de problèmes de santé liés à la température dans le bureau. L'employeur a contrevenu à la Directive sur l'utilisation et l'occupation des immeubles.
Pour compléter l'exposé des faits du représentant de l'agent négociateur, le représentant du ministère observe que la fonctionnaire a présenté une demande d'indemnisation d'un accident du travail pour les jours de travail perdus, mais que la demande a été rejetée parce qu'elle a omis de fournir les pièces justificatives demandées.
Le représentant du ministère indique aussi que la direction locale a consulté la coprésidente syndicale du comité local de santé et de sécurité et qu'il a été confirmé que les employés avaient été avisés de prendre une pause prolongée au centre Y. La coprésidente a indiqué que la réaction de la direction était prudente et qu'il n'avait pas été établi qu'il allait faire extrêmement froid dans l'immeuble. La fonctionnaire s'estimant lésée n'a pas fait part de ses doléances à la coprésidente - en sa qualité de représentante en matière de santé et de sécurité - au moment de la panne.
Le représentant du ministère indique qu'au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, la fonctionnaire s'estimant lésée a présenté une note de son chiropraticien, datée du 31 janvier 2001, au soutien de la thèse selon laquelle la température dans le bureau lui avait causé un problème médical qui l'avait rendue inapte à travailler. La note se rapportait à un incident antérieur de même nature, où la fonctionnaire s'estimant lésée avait estimé que la température dans l'immeuble était trop basse. On ne saurait accorder de valeur probante à ce document vieux de deux ans et demi dans les circonstances actuelles.
Même si la situation temporaire résultant de la panne de courant ne concordait pas avec les dispositions de la directive du CNM, la direction prenait des moyens pour faire face à une situation exceptionnelle, qu'elle suivait de près. Il s'agissait clairement d'une situation exceptionnelle sur laquelle la direction n'avait aucune prise. Il aurait été prématuré de fermer le bureau et de renvoyer les employés chez eux puisqu'on prévoyait que le courant allait être rétabli sous peu. La direction a agi avec prudence en conseillant aux employés de rester sur place et en leur offrant la possibilité de prendre une pause prolongée dans un centre commercial situé à proximité.
Le représentant du ministère fait observer que la décision de quitter le travail était reliée aux problèmes de santé personnels de la fonctionnaire s'estimant lésée et que la direction était disposée à lui accorder des congés de maladie ou des congés annuels. Étant donné que la fonctionnaire s'estimant lésée s'est abstenue de fait part de ses doléances à la représentante en matière de santé et de sécurité au moment de l'incident, il s'agissait dès lors d'une utilisation appropriée des congés.
La mesure corrective demandée n'est pas du ressort du Conseil national mixte ou ne s'inscrit pas dans le cadre de la Directive. La fonctionnaire a présenté un grief en vertu du processus du CNM. Elle a fait valoir que le ministère avait contrevenu à la directive du CNM et demandé que les crédits de congé utilisés lui soient restitués. Il s'agit d'un droit prévu par la convention collective qui n'est pas du ressort du CNM.
En conclusion, le représentant du ministère indique que même s'il est possible de démontrer que la fonctionnaire s'estimant lésée a été traitée selon l'esprit de la directive, le Comité n'est pas habilité à accorder la mesure corrective demandée; le grief devrait donc être rejeté.
Le Comité exécutif examine le rapport du Comité de la santé et de la sécurité au travail et accepte la conclusion selon laquelle la direction, malgré ses bonnes intentions et les mesures mises en place, ne s'est pas conformée à l'esprit de la Directive sur l'utilisation et l'occupation des bâtiments au chapitre des conditions ambiantes prescrites du lieu de travail en ne prenant pas de mesures efficaces pour fournir un lieu sûr à la fonctionnaire s'estimant lésée.
Le Comité exécutif accepte que le grief soit accueilli en partie, mais conclut que les questions relatives à l'utilisation des crédits de congé annuel ou de maladie en vertu de la convention collective n'étaient pas du ressort du CNM. Le Comité exécutif fait également observer que, dans ce type de situations, il était courant de fermer l'édifice. Si cette mesure avait été prise par la direction, la fonctionnaire n'aurait été appelée à fournir un formulaire de demande de congé pour la période en question.